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Comment donc ? On mangerait mal ? En France ? LA patrie de la gastronomie ? S'agit-il d'une plaisanterie de mauvais goût ?
Et bien oui ! Je le clame haut et fort, aujourd’hui en France on mange souvent mal et parfois même très mal. Oh, certes pas dans les restaurants étoilés où la qualité reste tout de même satisfaisante, à condition évidemment d’accepter de s’endetter pour les vingt prochaines années avant de déguster la dernière création du chef. Non, le drame c’est que la qualité des petits restaurants a atteint des records de médiocrité. Sans parler des cantines d’entreprises, des bistrots branchés, des snacks et des bars de quartier. On a droit à tout sauf à la qualité. Du surgelé, du réchauffé, du périmé et pire encore : de l’industrialisé se faisant passer pour du traditionnel ! Tout y passe ! Nous sommes pris en otages par des imposteurs, par des maniaques du pré-cuit et de la vinaigrette en sachet !
Bien heureux les français qui connaissent encore de bonnes adresses car la plupart des fois, il faut bien le reconnaître, la déception est au rendez-vous et l’addition est copieusement salée.
Je passe sur la situation des touristes étrangers obligés de s’enfiler les merveilleuses trouvailles de nos petits chefs ou de nos apprentis pizzaiolos créateurs de sandwichs, reconvertisseurs de panini et crostini. S’ils ne parlent pas notre langue, ils sont cuits : impossible de se plaindre, en revanche notre réputation à l’étranger en prend un coup. C’est Waterloo, c’est la bérézina!
On est donc en droit de se demander ce qui s’est passé au cours de ces vingt dernières années.
L’invasion des fast food, la percée des cuisines ethniques, les gens qui ne cuisinent plus faute de temps, la perte du goût n’expliquent pas tout. C’est plutôt dans l’orgueil national, dans les certitudes inébranlables qu’il faut chercher les raisons de cette cuisante défaite.
Contrairement à la cuisine italienne qui brille par sa fraîcheur et sa simplicité ou à la cuisine espagnole (pour ne citer que nos voisins les plus proches) qui allie dynamisme et innovation, la cuisine hexagonale n’est plus capable de se remettre en question. Elle continue de vanter contre vents et marées ses sauces, ses crèmes, son beurre et son cholestérol, bref tout ce qui fait horreur aujourd’hui aux nouvelles générations de gastronomes en quête de saveurs, légèreté et huile d’olive.
La cuisine française est engoncée dans ses traditions et refuse d’en sortir. Certains se défendront en citant la nouvelle cuisine censée jadis révolutionner nos habitudes. Et bien force est de constater que la leçon n’a pas été retenue, l’échec retentissant qu’elle a connu aurait dû en faire réfléchir plus d’un. La révolution certes ! Mais pas en proposant des portions microscopiques présentées de manière pompeuse. Il fallait radicalement changer de cap en choisissant la cuisine de qualité accessible au plus grand nombre au lieu de quoi nous nous sommes repliés sur des valeurs sûres désormais désuètes et indigestes.
N.B: il y a un jeu de mot avec l’expression : “le temps se gâte” (le temps passe au mauvais) et le verbe “gâter” une sauce (rater une sauce).