EXERCICE1: Synthèse de documents
Pour cela, vous dégagerez les idées et les informations essentielles qu'ils contiennent, vous les regrouperez et les classerez en fonction du thème commun à tous ces documents, et vous les présenterez avec vos propres mots, sous forme d'un nouveau texte suivi et cohérent. Vous pourrez donner un titre à votre synthèse.
Attention :
Vous devez rédiger un texte unique en suivant un ordre qui vous est propre, et en évitant si possible de mettre deux résumés bout à bout ;
Vous ne devez pas introduire d'autres idées ou informations que celles qui se trouvent dans le document, ni faire de commentaires personnels ;
Vous pouvez bien entendu réutiliser les «mots clefs» des documents, mais non des phrases ou des passages entiers.
DOCUMENT1: LA QUESTION MÉDIATIQUE
La question médiatique ne se ramène nullement aux problèmes déontologiques du jour- nalisme, ni aux concentrations monopolistiques des entreprises de presse, ni même au poids des logiques de rentabilité dans la production de l'information. Le phénomène est d'une tout autre ampleur. Lorsqu'on parle des « médias » - et Dieu sait si on le fait depuis une vingtaine d'années -, on évoque une réalité massive, protéiforme, et qui assoit chaque année un peu plus son hégémonie. L'appareil médiatique, tous moyens confon- dus, s'apparente à un « processus sans sujet », pour reprendre une célèbre expression de Marx, sur lequel même les acteurs qui opèrent en son sein - les journalistes, en l'occur- rence ont peu de prise. Presse écrite, télévision, radio et Internet : la machinerie planétaire ainsi constituée obéit à des mécanismes et à des causalités qui sont largement hors contrôle. Le phénomène, à la limite, devient autoréférentiel. Il se boucle sur lui- même. Son mode de fonctionnement s'impose à ceux-là mêmes qui s'imaginent, jour après jour, le piloter.
Cette autonomie procédurale du médiatique rend d'autant plus ambiguë et difficile à contrer l'influence qu'il exerce sur nos sociétés avancées. Or cette influence est aujourd'hui considérable. De la course à l'audience aux compétitions publicitaires, de la « chasse au scoop » aux unanimités lyncheuses, de la tyrannie symbolique des ima- ges à l'émotivité diffuse qui gouverne la télévision, des effets d'annonce en matière poli- tique à la transparence imposée sur le terrain judiciaire : toute la réalité sociale donne aujourd'hui l'impression d'être, pour une bonne part, reconfigurée par le médiatique.
Un empire sans empereur
La politique n'a pas seulement déserté les préaux d'école ou les travées du Parlement pour émigrer vers les studios de télévision. Elle a été contrainte de se soumettre aux règles langagières et rhétoriques qui prévalent dans les médias (petites phrases, séduc- tion, raisonnements simplifiés, exposition personnelle, registre émotif, etc.). Son statut s'en est trouvé transformé, en même temps qu'était rompu l'équilibre traditionnel des pouvoirs. Le rapport de force entre le politique et le médiatique s'est largement inversé au bénéfice du second. On se réfère d'ailleurs à cette métamorphose lorsqu'on emploie la formule « démocratie d'opinion ». Qu'est-ce à dire ? Que la démocratie d'autrefois ne mettait pas en concurrence des opinions ? Bien sûr que non. Le syntagme désigne de façon imprécise une mutation de la démocratie moderne : les opinions dont elle organise maintenant l'affrontement ne sont plus celles qu'étudiait jadis la science politique à travers la géographie électorale et la recension des « familles » politiques. Les opinions que produit aujourd'hui, et recycle en permanence, l'appareil médiatique, sont à la fois individualisées et nomades.
La justice, de son côté, n'a pas été soumise à la seule curiosité investigatrice du jour- nalisme. Elle a vu ses règles et son rythme de fonctionnement se modifier sous l'emprise du « spectacle », qu'il s'agisse du secret de l'instruction rendu obsolète ou du tempo judiciaire, dorénavant assujetti à l'urgence, voire à l'immédiateté, du moins dès lors qu'il s'agit d'une affaire d'importance, et qui sera médiatisée. De la même façon, le fonctionnement du système scolaire a été changé sous l'influence de ce continuum informa- tif et distractif qui concurrence l'École du dehors et met en échec le projet pédagogique. Le médiatique, proliférant et tentateur, se pose en rival du maître - ou des parents - et vient chambouler l'ordonnancement de ce qu'on appelait jadis la transmission et l'éducation.
La vie économique n'est pas en reste, qui se trouve soumise à une visibilité perma- nente et placée sous un éclairage capable de modifier jusqu'au fonctionnement des grandes entreprises : vedettariat des dirigeants, versatilité des actionnaires sous l'in- fluence des médias, investigation du journalisme à la recherche des « secrets », pression des agences de cotation ou de rating, mouvements d'opinion soudains, etc. Le même rai- sonnement pourrait être tenu à propos de l'édition et, à travers elle, de la vie intellectuelle dont c'est peu dire qu'elle se trouve bousculée par les nouvelles règles du jeu médiatiques et promotionnelles, guère favorables à la réflexion fondamentale ou à la lit térature exigeante.
Où que l'on tourne son regard, il n'est donc pas un seul secteur qui ne soit aujourd'hui hors d'atteinte de cet empire médiatique dont la particularité est qu'il est sans empereur, c'est-à-dire mû d'abord par des mécanismes et des automatismes avant de l'être par des intentions calculatrices. Voilà de quoi il est question lorsqu'on parle à son propos de « processus sans sujet ». La médiatique obéit d'abord à ses propres pesanteurs. Ses commandes ont été partiellement soustraites à la volonté des acteurs. On se trouve placé devant l'émergence d'une réalité massive, tyrannique, moins facile à définir qu'on ne pourrait le croire. Dès lors, on ne s'étonnera pas du nombre grandissant de publica- tions, livres, colloques, dossiers, thèses universitaires ou programmes de recherche qui font du « médiatique » un sujet d'études, de polémique ou de réquisitoire. L'analyse de cette « chose » sans vrais contours ni équivalents est en passe de devenir une nouvelle discipline du savoir, une science sociale à part entière.
Le « médiatique » étant ainsi resitué, on aurait tort de n'y voir qu'une technique de communication d'un genre nouveau, qu'une méthode plus ou moins critiquable de des- cription du réel, qu'un pur système d'échange de ces biens immatériels que sont les informations ou les distractions. En apparence, c'est vrai et, comme le mot l'indique, les médias ne sont qu'une « médiation » instrumentale, qui n'est pas porteuse, en elle- même, de subjectivité. À y regarder de plus près, les choses se révèlent sensiblement dif- férentes. En réalité, le médiatique est régi par des effets de croyance. Une forme de cléricalisme y est à l'œuvre. Une religion spécifique y est repérable. En d'autres termes, on dira que la machinerie médiatique produit de la croyance en continu. Ces croyances ont ceci de commun avec celles qui rôdent sur les territoires de l'économie ou de la technique qu'elles sont en général inconscientes d'elles-mêmes. Elles sont pour ainsi dire ingénues, situées en deçà du prétendu mensonge ou de la manipulation délibérée qu'on impute, le plus souvent à tort, aux responsables des médias. [...] La télévision, pour ne citer qu'elle, dispose de ses prêtres, diacres et sous-diacres, capables d'assurer, à heure fixe, le bon déroulement des offices vespéraux. La télévision occupe dans la « cité » la place qu'y tenait la religion, au sens où l'entendait Émile Durkheim. C'est elle qui assure une bonne part du lien social. C'est par son entremise que circulent des « récits », grands ou petits, dont la fonction quotidienne est de relier les individus atomisés de la société contemporaine, de les rassembler dans une même foi. A la télévision, la messe est dite chaque soir.
D'après Jean-Claude Guillebaud, « La question médiatique », la revue : Le débat , Penser la société des médias, n° 1 38, janvier-février 2006.
DOCUMENT 2: DU POUVOIR DES MEDIAS À L'ÉCLATEMENT DE LA SCÈNE PUBLIQUE
Le « quatrième pouvoir » supposé exercer un contre-pouvoir aurait-il outrepassé son rôle ? Serait-il devenu, au fil du temps, le juge suprême du politique, formulant la sanction et exerçant l'application de la peine ? Signe des temps, France Culture nous offre désormais une intéressante émission intitulée, tout simplement, « Le premier pouvoir ». Depuis plus de vingt ans, en effet, la montée en puis- sance des médias, et singulièrement de la télévision, semble inexorable, au point de modifier l'écosystème de la démocratie. C'est ce que nous disent une certaine « médiologie » et les médias eux-mêmes, fascinés par leur prétendue influence. C'est ce que répè- tent beaucoup d'hommes politiques pour mieux justifier leur impuissance ou leurs lâchetés. C'est ce que dénonce une critique de gauche radicale, prompte à tirer un trait d'égalité entre force de frappe médiatique et domination idéologique.
Quand la télévision, dans un modèle non encore affaibli par la multiplication de l'offre de chaînes et la fragmentation généralisée de l'audience, fabriqua l'unité de lieu, de temps et d'intrigue du rapport des politiques à leurs électeurs, le quatrième pouvoir put com- mencer de rêver d'être le premier. Le petit écran ne se contenta pas d'offrir aux politiques qui exerçaient le pouvoir ou aspiraient à le conquérir un contact puissant et immédiat avec le peuple. Il les obligeait à modifier leur agenda, transformer leur langage et soigner leur apparence.
Depuis une trentaine d'années, le débat démocratique, dans les pays développés, s'organise en fonction des impératifs télévisuels. Il ne s'agit pas tant de l'usage émotionnel des jour- naux télévisés du soir pour accueillir en direct des otages récemment libérés ou prononcer une allocution de circons- tance que de la prédominance totale du petit écran comme tribune de l'expres- sion politique. Que vaut désormais, pour un chef de gouvernement, le dis- cours d'investiture devant la représen- tation nationale par rapport à sa première « prestation » dans l'émission politique phare du moment ?
Si le petit écran scande son tempo, il oriente aussi le langage du politique. Non pas tant par l'usage démotique de telle ou telle expression populaire - les préaux de l'école y étaient également propices - que par la simplification à l'outrance d'un dis- cours nécessairement complexe. Le discours se limite désormais à un mes- sage, l'exposition à une conclusion et la rhétorique à une formule. Les spin doc- tors ont fait commerce du talent à réduire à quelques « petites phrases » la pensée politique. Exercice, on l'imagine bien, qui contribue à réduire concomi- tamment la désacralisation des politiques.
Ce n'est pas tout. Le style doit être de plus en plus conforme à la fonction principale d'entertainment du média télévisuel. Inutile de développer ici la perversité d'un système qui cherche à présenter l'élu ou le responsable sur le même plan que l'acteur ou le témoin. À force de confusion de rôles, on en vient vite à cette question réservée, en prin- cipe, à la promotion des faiseurs de spectacles mais posée implicitement à tout politique croyant faire de l'au- dience dans une émission people : quelle est votre actualité ? Comme si celui-ci n'avait pour fonction que de mettre en scène et de vendre une « expression » publique. Le processus est évidemment achevé quand, dans certains pays, la publicité politique envahit les écrans publicitaires lors des consultations électorales.
Le pouvoir de la télévision est à ce point reconnu que l'on se prend volon- tiers à son jeu. Et que la principale question qui surgit à l'issue d'une émis- sion politique est celle-ci : a-t-il été « bon » ? a-t-elle été « bonne » ? On est ainsi passé de la psychosomaticienne de la politique - est-il sincère, honnête, convaincant ? etc. - à sa « peopolisa- tion ». Dès lors, il est tentant de consi- dérer que les politiques ne sont plus que des marionnettes - ce qu'ils sont d'ailleurs rapidement devenus, « Guignols de l'info » ou autres, dans les grilles des programmes. Le petit écran ayant œuvré à la banalisation des poli- tiques, les médias en général n'ont-ils pas travaillé, parallèlement, à leur délé- gitimation ?
D'après Denis Pingaud, Bernard Poulet, « Du pouvoir des médias à l'éclatement de la scène publique », la revue : Le débat . Penser la société des médias, n° 138, janvier-février 2006.
Je vous la renverrai corrigée...
EXERCICE 2: Essai argumenté
La télévision fait depuis sa création l'objet de polémiques virulentes. « Sacrée télévision » pour
les uns, « télévision sacrée » pour les autres, le débat est loin d'être pacifié. Entre le pouvoir
et l'influence présumés du petit écran et le libre arbitre supposé des téléspectateurs, qui a
gain de cause ?
Rédigez un essai argumenté sur ce thème, en exprimant vos positions personnelles sur la
question et en vous inspirant éventuellement des trois documents précédents.
Votre essai devra comporter 500 mots environ.
Je vous le renverrai corrigé...